attention, ce texte peut heurter votre sensibilité, merci d'agir en connaissance de cause
Tu le savais n’est-ce pas ?
Et toi aussi tu le savais ?
Et toi tu savais, non ?
Pourquoi alors
Pourquoi.
Pourquoi tu t’en ai servi pour me détruire.
Pourquoi tu ne m’a pas dit que j’étais un garçon.
Pourquoi tu me l’as dit comme si c’était la pire chose qui puisse exister.
Pourquoi tu m’as fait haïr les hommes pour ensuite me faire réaliser que j’en suis un ?
Pourquoi tu m’as fait naître dans la haine et la honte de mon être ?
A tel point qu’à la seconde où j’ai réalisé d’être un homme, j’ai dit que j’allais être une femme.
Même plus une gouine, une femme à part entière.
Car jamais je ne pourrais survivre à ta haine des hommes
trans.
Première injection. Je me lève un matin je me dis « aujourd’hui c’est LE jour »
J’y vais, à la recherche, j’y vais au talent
je mets ma jolie jupe et ma chaine autour du cou et je me lance
je croise des mecs trans je me dis qu’ils sont tellement beaux que j’ai trop hâte de leur ressembler
vous êtes beaux mes frères, un jour j’apprendrai à vous le dire
on m’explique les aiguilles, je regarde attentivement et mon corps commence à trembler
d’exitation ou de peur ?
Je veux faire mon injec moi même, mes mains sur la seringue l’aiguille dans ma cuisse
ça ne fait pas mal
mais dès que ça se termine
que je la retire de mon corps
la tête qui tourne et le vertige me prends
je vois et j’entends de moins en moins
ça m’inquiète
on me prends la main
on m’amène dehors
on me tend un verre d’eau
on me parle
je me dis
que c’est beau
d’être entourer de trans
au bord du malaise
je suis si heureux
j’aurais dû faire ma deuxième injec
mais mon corps était trop endoloris
pour sortir de mon lit
et les angoisses trop présentes encore
c’est dur de l’avouer
mais j’ai peur des trans
et je suis trans
essayer de vivre après
les violences conjugales
les violences intracommunautaires
c'est tellement dur
j’ai l’impression que n’importe quelle relation peut devenir
un enfer
du jour au lendemain
en quelques secondes
je vis avec cette vérité là
ancrée profondément en moi
j’ai peur des queer et les hétéro me rendent giga dyspho
je peux pas sortir de mon lit
est-ce que ça vaut la peine de transitionner si je ne peux même pas voir le soleil se lever et la lune resplendir ?
Je pense au coming-out
je me dis comment parler de ça
de mon genre
du genre
est-ce que je peux dire mon genre
est-ce que ce genre peut être mien ?
Je regarde les autres coming out trans autour de moi
comment je peux dire fermement que je suis un homme
si je n’y crois pas moi même
ma transidentité naît dans la violence
comment je peux en être fier ? Comment je peux
l’assumer en l’affirmant pleinement ?
Entre trans c’est bien on pose pas trop de question
tu dis je m’appelle cailloux et c’est tout
mais les cis, leurs questions me terrifient
que répondre ? Comment parler de mon genre ?
C’est quoi pour toi être trans ? Qu’est-ce que tu ressens ?
Qu’est-ce qui te différencie de moi ?
Toutes les réponses que je peux donner convergent vers le même point :
la violence
que j’ai toujours appris à soigneusement cacher
Qui suis-je ?
Je ne suis pas trans
je ne suis pas un homme ou une femme
je ne suis pas non binaire
je suis
qu’est-ce je peux être ?
Je voudrais te dire à quel point l’impossibilité d’être une femme est violent
à quel point ce monde déteste les hommes trans et que c’est pour ça que j’ai choisi de l’être
à quel point la « non binarité » m’a été imposée violemment pour me marginaliser et m’empêcher d’être un homme et m’empêcher d’être une femme
à quel point tout dans le genre me tue
je voudrais te dire comment on m’a traité quand je n’étais pas assez femme et trop homme
je voudrais te dire que j’existe à peine dans ta réalité
que j’ai tellement de réalités tellement de prénoms tellement de genres que je ne sais plus quoi en faire que de mes bras tout déborde et tombe et que je ne sais pas quoi ramasser
mais toi cisgenre, donne moi les mots pour me outer sans parler de violence
vois-tu ? Tout ces mots me révulsent, ce n'est pas moi.
1er rendez-vous chez l’orthophoniste
c’est un appel gratuit de 15 minutes en visio
mais je n’ai nulle part ou passer l’appel
je demande à mes potes cis mais personnes ne réponds
je demande à des inconnu..es transpédé
on me répond dans la minute
on m’acceuille dans son salon et je peux passer mon appel tranquillement
on me sert un verre d’eau et on discute ensemble de transition
j’aime bien cet endroit
on contribue constamment au maintient des normes de genres
et pourtant moi devant vous j’ose m’en échapper
dire que je suis trans
vous fait demandez
comment ?
Comment continuer à être proche de moi ?
Comment relationner en dehors des normes de genre et de l’hétérosexualité ?
Alors je sais, je sais ce que vous allez faire
vous allez chercher à imposer votre hétérosexualité sur ma transidentité
mais je la refuse aussi
et alors tout explose
la violence au grand jour
vous allez me trouver laid, si laid
vous allez me voir comme une fille moche
et pas comme un beau garçon
je le sais, vous me le dites déjà tous les jours
vous me dites « tu es jolie comme ça » quand je mets une jupe et du maquillage
vous me dites « les cheveux courts ça te va pas » « c'était mieux avant »
vous me dites « t’es sûre ? Ce pantalon ? T’es sûre tu veux pas t’épiler ? J’ai acheté de la cire, tu pourras mettre des jupes comme ça, sinon ça gâche tout, c’est dommage »
vous me dites « c’est dommage » vous me dites « c’est du gâchi »
vous me dites que je ne suis belle que dans l’hétérosexualité
vous vous dites comment
je peux assumer ça ? Auprès de mes ami-es et du reste de la famille ?
Vous vous dites comment
je peux maintenir l’héterosexualité
avec ce transexuel à mes côtés ?
C’est une bonne question
je vous dirais
ayez peur, mais ayez aussi du courage
rendez vous compte à quel point
l’hétérosexualité est une barrière
à l’amour
je repense à mon coming out
je ne fais que dire que mon genre c’est le résultat de violence genrées
mais il n’y a pas que ça
il y a d’autres petits trucs
il y a que quand j’ai l’air d’un garçon dans le miroir
je ressens un truc
il y a que certains vêtements quand je les mets
je ressens un truc
il y a que certains prénoms quand je les porte
je ressens un truc
il y a de la gêne et de l’euphorie
je ne pourrais pas te dire, mon genre, mon nom, pourquoi comment je peux seulement te dire que je dois prendre des hormones. Je peux seulement te dire que c’est là le chemin que je dois prendre, tu ne pourras pas m’en empêcher. Tu peux me soutenir ou me mettre en danger.
Tu peux m’aimer ou me mépriser. Tu peux me rejetter ou faire face à toi même.
Exercices sur la voix :
1) Décrire ma voix
ma voix est horriblement aïgue, claire mais un peu enrouée, je n’articule pas beaucoup et je peux parler vite ou ne pas parler. « féminine » et quand j’ai de la chance neutre. Parfois je parle trop fort sans m’en rendre compte, je sais pas pourquoi ça le fait surtout avec l’une de mes potes à moi, sinon quand je suis pas surexcité ma voix est plutôt calme
quand j’écoute un enregistrement de ma voix je me dis que c’est une horreur totale
pitié que c’est l’enregistrement qui modifie et que ma voix n’est vraiment pas comme çapour les autres
2) Comment considérez-vous votre voix parmi ces adjectifs ?
[Un atout, un poids, une identité, une amie, une ennemie, traîtresse, agréable, confortable, utile, banale…]
utile ? Insupportable ? Un outil de mégenrage ? Jolie uniquement quand je chante dans ma langue natale, précieuse.
3) Quand ma voix change
quand ma voix change je suis angoissé
quand ma voix change ça va plus vite que moi
quand ma voix change je contrôle pas
quand ma voix change ça me trahit
quand ma voix change je me sens si nul si pathétique
quand ma voix change je me sens soumis
ma voix change quand je parle à des cis
ma voic change quand je dois obtenir ce travail
ma voix change avec ma mamie qui veut que je sois une fille
ma voix change pour avoir l’air d’une fille respectable
ma voix change pour m’échanger à la place de leur confort
ma voix change pour me protéger
ma voix change pour avoir l’air cis
ma voix change pour avoir l’air trans
ma voix change pour avoir une place
4) quelles voix me plaisent
j’adore les voix des hommes trans hormonés quand elles sont un peu graves et suaves
je trouve leur voix trop belle
je peux les écouter des heures
j’adore les voix très grave, notamment celle des rappeurs qui ont la voix basse et enrouée
je ne veux pas forcément leur voix, mais j’adore les écouter
je veux une voix comme celles des hommes trans qui s’expliment
j’aime les mecs trans
je veux une voix
de pédé
Aujourd’hui la fatigue chronique bat son plein et je passe la journée épuisé dans mon lit. Mal au ventre et mal à la tête. En état d’angoisse sans trop savoir pourquoi. Je repense à beaucoup de chose. Hier dans une rencontre queer je me suis fait mégenré, en soit ça me dérange pas trop d’être mégenré. Mais en y repensant ça m’ a un peu mis mal parce que j’étais quand même habillé assez masc, même si ma voix ne l’est pas et que je sais que j’ai pas trop de passing, je me disais que les gens queer pouvais en me voyant au moins se douter que j’étais potentiellement transmasc, et donc éviter de me genrer au féminin sans me demander avant. D’ailleurs hier, c’était particulier, le matin j’étais habillé assez fem avec un legging noir et un haut blanc sans manche fait en crochet par mon arrière grand-mère je crois. J’avais mis une brassière noire en dessous vu que je vis avec des hétéro pour pas choquer et cacher mes boobs. Mais bref, c’était très fem, ça m’allait bien, j’aime beaucoup cette tenue. Puis je me suis dit que le haut crocheté m’irait très bien aussi en homme, et ça m’a rassuré. Après pour rejoindre les queer là je me suis habillé en masc et ça m’a alors donné beaucoup d’euphorie de genre. Pour le moment je n’ai pas encore assez de vêtements pour avoir un look masc ne serait-ce que pour une semaine alors je le fais que pour certaines occasion. Dans le miroir j’ai commencé à entrevoir l’homme que je voulais devenir aussi bien physiquement que psyhologiquement mon rapport aux autres en tant qu’homme commençait à se dessiner, à devenir un peu plus clair même si encore très flou. Je crois que les cheveux pas rasé, un peu long mais en restant courts m’iraient bien quand j’aurais pris des hormones, mais pour le moment j’ai hâte de me raser de nouveaux les cheveux. Cette nuit j’ai rêvé de mon ex, celle qui m’a… pas très bien traité et qui a été assez transphobe avec moi. Celle qui a complètement détruit mon rapport à mon genre et la possibilité pour moi d’être un mec trans. Le rêve était bizarre, je crois on était dans une sorte d’internat et on partageait la même chambre. Je crois elle m’en voulait ou qu’elle me méprisait. À un moment je sais que je lui ai dit qu’elle m’avait beaucoup blessé et qu’elle n’a pas été capable de le reconnaître, d’y faire face et de s’en excuser, puis que je l’ai prise dans mes bras. Mais même si c’était elle c’était pas vraiment elle, dans la réalité elle n’est pas vraiment comme ça. Bref je dors assez mal. Je me réveille épuisé et déprimé. Je trouve qu’il y a quelque chose dont on ne parle pas assez dans les parcours trans : c’est la solitude. Dès l’enfance j’ai été marginalisé du fait de ne pas être hétéro. Et même avec ma famille, le fait d’être quelque chose qui leur est insaisissable met de la distance entre nous. Ensuite même dans les milieux queer la transphobie y règne. Et puis, plus j’avance dans ma transition et plus je sens que j’ai de moins en moins ma place dans les milieux féminins, féministes, sapphique, queer. Il me reste le milieux pd. Mais comment être pd quand on est asexuel ? La plupart des représentations pd que j’ai tournent autour du cul. Je trouve ça passionnant, vraiment j’adore lire des témoignage et des écrits transpd qui parlent de cul, mais d’un côté ça me donne l’impression de ne pas vraiment l’être non plus, de ne pas y avoir ma place. Je sais qu’actuellement si j’ai besoin d’aide c’est aux pd et en particulier aux trans pd que je demanderais et que c’est avec elleux que j’ai le plus de chance de faire communauté. Même si les hommes cis pd peuvent être transphobes, je pense être moins sensible et touché par leur transphobie que celles des autres. C’est ce qui fait que c’est vers eux que je me tourne. Mais je reste tout de même en retrait. Il y a aussi le fait que je suis tellement traumatisé des relations amoureuses et affectives que je ne sais pas si je serais capable de de nouveaux avoir ce genre de relations avant un moment. Alors je mets beaucoup de distance avec les gens, je ne m’exprime pas beaucoup, j’essaie de pas donner trop d’info, de pas trop me rapprocher trop vite. Et puis il y a tous les endroits et les collectifs queer ou autre à éviter pour pas recroiser ses ex. Forcément au final je reste seul. Mais je me dis qu’au vu de ce que j’ai vécu, ce que j’arrive à faire c’est déjà beaucoup. Je peux avoir l’air faible, fragile, froid, à fleur de peau, asociable, vide, au fond je suis fort pour survivre et tenter de me reconstruire. Hier avant de dormir j’ai voulu dessiner une romance avec un mec trans, celui que je voyais dans le miroir. Mais j’ai raté le dessin et j’étais trop fatigué pour le faire. Je crois j’avais besoin de voir un mec trans dans une relation affective qui ne soit pas transphobe et fétichisante et infantilisante, je crois je voulais me dessiner à moi même ce que désire. Mais je ne sais pas dessiner. Hier je me disais que c’était trop bien de se dire que l’on pouvait modifier son corps, que si on voulait le changer ba on pouvait vraiment le changer. Je trouve ça génial. Hier je réfléchissais aussi à une performance artistique que j’aimerais faire mais qui n’auras probablement pas lieu. Et je m’imaginais avec un peu de moustache et une vois plus basse et j’étais trop content de m’imaginer comme ça et que si j’arrivais à ce moment de ma transition pour la date de la performance alors tout serait parfait. Que c’est en tant qu’homme trans que je veux réciter mes poèmes. Aujourd’hui à l’inverse prendre des hormones me terrifie. Je me dis que c’est terrifiant de changer son corps. Pourtant mon corps change naturellement tout seul. Mais même si c’est moi qui choisi de prendre des hormones il y a une part de non contrôle qui peut être terrifiante. Puis aussi, vu que je suis crevé je passe ma journée sur les réseaux sociaux où je vois des commentaies transphobes du style « t’es peut être content maintenant mais tu va mourir à 40 pour avoir pris des hormones c’est trop con » « pourquoi personne ne préviens sur le danger des hormones qui donnent des cancer » je sais que c’est faux, ça reste que ça t’angoisse quand même. J’ai déjà tellement de problème de santé ça me terrifie d’en rajouter. Je sais que je serais un homme trans à la fois très masculins et normés qui sera rejeté des milieux queer et à la fois effeminés qui se fera tabasser dans la rue. Je sais que je serais encore plus isolé. Je sais que les gens queer en me voyant voudrons savoir si je suis cis ou trans et s’iels ne se posent pas la question c’est que iels me voient comme trans et non comme un homme. Et ça me rendra dysphorique. Je n’ai pas envie que les queer sachent que je suis trans, j’hésite à les éviter le temps d’avoir un passing, je n’ai pas envie d’être vu dans cette état de pré-T. Bref jsp, je suis perdu, isolé, angoissé, fatigué.
Aujourd’hui j’ai aussi acheté un binder d’occasion à un mec trans qui avait mis une annonce, même si on a parlé que de la transaction ça m’a fait du bien de lui parlé. J’ai vraiment l’impression qu’il n’y a que avec les hommes trans où j’arrive à ne pas me sentir trop mal vis à vis de ma transidentité et de mon genre. Les autres ne font que projeter des choses sur moi dans lesquelles je ne me retrouve pas et qui finissent par me dégoûter de mon propre genre. Actuellement je ne crois pas avoir quelqu’un dans mon entourage avec qui je me sens bien au niveau de ça, et je crois que ça me pèse. J’espère pouvoir rencontrer d’autres hommes trans de mon âge, ça me ferait du bien je pense.
Dans ma famille je prends soin de ma grand-mère de ma tante de ma sœur de mes cousines et de ma mère et je baby sitte mon père et mon oncle et mon cousin. Faire en sorte que la violence ne m’atteigne pas pour prendre soin des autres. Cacher mes blessures pour que les autres acceptent que je les soigne. Puis, essayer de parler aux hommes, sans qu’ils se braquent, deviennent violent, sans qu’ils se sentent attaqués sans qu’ils se vexent. Mais je suis la folle hystérique de la famille. Ma voix ne compte pas, on refuse de me laisser parler. Et puis, quand je ne prends plus soin des hommes, ils battent les femmes de ma vie, ils négligent les enfants, la violence nous ensevelit. Et moi je suis là pour ramasser les larmes, rassurer, consoler, dépeindre un futur pour donner de l’espoir, caresser, donner de l’affection, râler, écouter, aimer.
Je me demande si tout ça changera quand j’aurais pris des hormones, mais je ne pense pas.
Votre silence
il est là il est partout
je ne m’étais pas rendu compte
à quel point il était aussi grand
quand j’étais enfant
tu ne m’as jamais dis que tes amis étaient en couple
je n’ai jamais lu aucun livre ni vu aucun film avec des gays dedans
si ce n’est des années plus tard quand je me les suis procuré moi même
quand j’ai coupé mes cheveux
que je t’ai dis que j’avais une copine
jamais tu n’as utilisé le mot lesbienne
ni même gay homo gouine ou quoi que ce soit d’autres
rien tu n’as rien dit
quand j’ai dit que je me suis fait abusivement interpeller par les flics
pour avoir été visiblement queer dans l’espace publique
tu n’as rien dit
quand je m’habille de manière masculine vous dites que c’est laid
pourtant vous savez que je suis lesbienne
et que c’est par mes vêtements que vous le devinez
mais vous ne dites pas « ta sale dégaine de gouine »
vous ne dites jamais le mots vous faites comme si c’était pas lié pourtant c’est vous les premiers à y faire un lien vous dites rien pourtant dans vos yeux GOUINE transparaît
jamais on a parlé de mon homosexualité
et encore moins d’homophobie
pourtant je suis là
si je suis important pour toi pourquoi ceci ne t’interresse pas ?
Les femmes hetero elles sont pas homophobes
c’est elles qui le disent, qu’elles sont un meilleur ami gay qui s’occupent d’entretenir leur hétérosexualité et d’être leur psy post-rupture
mais les meufs hétéro qu-est ce qu’elle font pour nous à part nous fétichiser et nous utiliser comme un badge ?
Les meufs hétéro elles ont des amis gay mais les lesbiennes elles ne leur adresse même pas la parole. Les mecs hétéro me disent au moins bonjour par politesse, même si après ils ne m’adressent pas la parole non plus – car je suis la lesbienne moche qu’on ne peut pas et veut pas pécho. Les meufs hétéro elles ont des amis trans à fétichiser et infantiliser mais des femmes trans à harceler. Mais si tu leur demandes « t’es homophobes » elles diront non.
Pourtant, es-tu amie avec une femme trans lesbienne ?
Pourtant es-tu capable de faire communauté avec elle?
Pourtant es-tu capable de prononcer le mot « lesbienne » devant moi ?
Pourtant es-tu capable d’entendre mon homosexualité ?
Voilà à quel point nous sommes remplis du silence de l’homophobie.
Les meufs hétéro elles sont où quand on se fait agresser ? Quand on subit des violences conjugales ? Des violences intra familiale ? Quand on nous pousse au suicide ?
Nulle part, car si on ne peut pas parler d’homosexualité, on ne peut pas parler de toute la violence qui nous meurtrit et nous assaillit, et par conséquent vous ne pouvez pas la saisir ni même la voir. Par le silence vous choisissez d’ignorer, nous exploiter sans rien donner en retour que des miettes. La seule homosexualité que vous acceptez de voir est celle qui vous est consommable – en réalité vous nous déshumanisez complètement. Voilà c’est quoi le prix de votre silence, l’écrasant silence de l’homophobie. Il vaut mieux nous laisser mourir que d’être salie par les amours dégueulasses grotesque et pervers de ces sales pédés et de ces immondes gouines. Si je ne peux pas les exploiter, qu’iels crèvent dans mon silence.
Les femmes hétéro, vous êtes où pour nous aimer ? Vous êtes où pour nous être amies ? Pour faire communauté avec nous ? Pourquoi votre ami gay quand il devient un peu trop traumatisé quand il devient un toxico fou psychiatrisé pas très beau à afficher en vitrine et plus très sexualisable vous le délaissez ? Vous étiez où pour le défendre ? Pour faire de la RDR ? Pour ne pas le jeter dans la solitude de la mort ?
Vous êtiez où ???
Les homophobes du silence, ceci est un appel, apprenez à nous aimer, réellement, salissez vous les mains dans notre humanité.
Je repense à cette nuit où nos corps se sont embrasssés
nos vies ne tiennent qu’à un fil
ce qui veut dire que chacune de nos rencontres est un miracle
notre amour mort né
a été punis
à peine qu’il commence à exister qu’on l’a tué et qu’on nous a traité-es de monstres
qu’on nous a séparé-es
qu’on nous a arraché notre amour
encore aujourd’hui la punition continue
mais comment je pourrait regretter
de t’avoir eue dans mes bras
ton souffle caressant ma peau
à l’ombre de la nuit
à l’abris des regards où les faibles rayons lunaires nous permettaient seulement de distinguer le contour de nos lèvres
dans le silence intime du secret
comment regretter
d’avoir célébré ce miracle
d’être sorti-es de la survie et de la honte le temps d’un instant
des vies trans bi gouines qui se dessinent à travers nos corps
Adieu mon amour
je me rends compte ici même que je n’ai même pas pu te dire au revoir
même les adieux on nous les a enlevés
on ne nous a laissé que la monstruosité dont on nous a affublé-es
Dis moi mon amoure, à quel point as-tu peur d’enlacer les monstres que nous sommes ? Iels ont eu notre amour, iels n’auront pas ma peur.
Adieu mon amour, je nous enterre ici et maintenant. Notre amour est mort et il ne renaîtra pas, mais comme je prends plaisir à le dire, c’est de la mort qu’en naissent milles autres, j’espère, plus longs et plus doux,
mon ange.
Je suis enfin allé chez le barbier pour la première fois
je voulais pas vraiment y aller mais mon amie cis m’y a un peu forcé
j’avais peur de rentrer dans le local alors mon amie cis m’a infantilisé
mais les femmes cis, que savent-elles de ma peur ? De ce qu’une coupe comme celle-ci implique dans ma vie ? De la violence à laquelle elle me mène ? Rien.
Pour elles c’est un jeu ou un fantasme fétichiste.
j’étais rempli d’angoisse, je demande à ce qu’on me rase les côtés
je savais qu’à chaque coup de rasoir sur mon crâne je m’enfonçais dans la connerie
au final on me rase tout, on coupe courts. Plus que ce que je voulais.
Mais c’est pas grave, ce n’est pas la première fois que j’ai les cheveux aussi courts
ça repoussera, c’est ce que je me dis.
Je sors je me trouve laid. Mon amie est partie depuis et je rentre seul avec des sandales féminines que ma mère m’a donné la veille et qui me déchiquète les pieds. Avec mon short féminin qui me rend dyspho à défaut d’en avoir d’autres et mes jambes poilues. Avec mes seins qui pointent de mon large tshirt masc et qui gâchent tout. Les gens me regardent mal et se retournent plusieurs fois à mon passage. Ce n’est pas la première fois. Ce n’est rien.
Mais je sais qu’à présent je suis de nouveau visiblement trans.
Je rentre à la maison, je me cache, j’essaie d’arranger la coupe, et je me justifie direct en la montrant à ma mère. Elle me dit que ça me va bien. Mais que si mes cheveux longs me plaisent pas il suffit d’apprendre à les coiffer avec des barettes.
Je souris amèrement, les barrettes ce n’est pas pour moi.
Aujourd’hui, le lendemain, je me dis que c’est pas si mal, je ressemble à une poètesse butch que j’admire, je me dis que je suis pas si moche en pensant à elle, et même que ça me va pas si mal. Je me demande si je suis butch. J’ai beaucoup de complication avec la butchness. Déjà parce que maintenant que je suis un homme je ne sais pas si je peux encore trouver ma place dans le lesbianisme. La première fois que j’avais entendu parler des butch j’ai trouvé ça génial : se détacher complètement du regard masculin, ne pas avoir peur d’être moche aux yeux du reste du monde, seul le regard lesbien importe.
Avant-hier j’étais à l’anniversaire de ma meilleure amie, il y avait son nouveau mec, il est bi, il est déjà sorti avec un mec trans et quand ma pote m’a dit ça j’avais peur que ce soit un fétichiste ou un tokeniste, mais au contraire, je trouvais que ça se voyait qu’il a déjà relationné avec un mec trans dans le respect qu’il avait à mon égard. J’adore son mec, je trouve qu’ils vont grave bien ensemble et j’adore leur couple. J’aime les mecs bi.
J’étais donc à cet anniversaire avec deux hommes cis qui me genraient correctement, alors oui, je ne faisais pas parti de leur bande, mais juste le fait qu’on me respecte un minimum dans mon identité c’était déjà beaucoup. Ça m’a fait du bien.
Le soir je suis rentré et j’ai fait une nuit blanche. Un de mes traumatisme a été redéclenché par quelque chose. Je me demande comment en tant que victime on peut réussir à s’exprimer, c’est tellement de courage. Je me sens si coupable de le faire, j’ai peur de mettre les personnes qui m’ont blessées en danger, mal, ou qu’elles s’énervent et se vengent. C’était terrible. Mon coeur battait si fort que j’avais peur qu’il explose.
en ce moment c’est souvent que je rêve d’être en couple avec un homme
cisgenre en couple hétéro
sexuel
où je suis une femme
une femme qui me ressemble mais pas exactement
elle est plus charnue et plus féminine
je me demande comme j’ai fait pour me retrouver là
je me rappelle alors que
dans un couple romantique
on est censer s’embrasser et se baiser
je me rappelle alors que
je ne suis pas une femme
et je suis asexuel-le
je panique
est-ce que je dois me outer ? Comment ?
Est ce que je dois prétendre être une femme hétérosexuelle ?
J’aime cet homme je ne veux pas le perdre ni perdre cet amour.
Est-ce qu’il m’aime assez pour devenir pédé avec moi ?
Puis je me réveille.
Flashback de toute les fois où j’ai dû faire semblant
jusqu’à en être agressé-e sexuellement.
J’ai oublié de préciser, mais j’ai pris rdv avec des psy du centre de santé. Première fois que j’aurais an psy qui devrait connaître la transidentité je suppose. Mais bon ça reste que j’aime pas les psy. Je me dis que c’est gratuit et que ça coute rien. Le rdv est dans deux mois et je sais même pas de quoi je pourrais parler. J’ai à la fois plein de chose à raconter et à la fois tout me paraît insignifiant.
C’est dur en ce moment, en réalité ça l’a toujours été. J’ai honte de moi et j’ai envie de disparaître. Je pense au fais d’être un homme trans, au fait d’être un homme tout court.
Je me demande où est ma place aussi. J’ai toujours été assez isolé et j’avais aussi tendance à m’isoler facilement. Enfin bref, je suis très isolé en ce moment. Je le vis pas si mal car j’ai l’habitude et que je sais gérer ça mentalement. Puis j’ai pas l’impression d’être réellement capable de socialiser avec des gens. Pas que je sois pas capable de parler mais c’est plus que que soit on a des réalités trop différentes, soit on a des réalités similaires mais ça reste que les gens de ma réalité sont dangereuxes pour moi. Par exemple les gens militants et queer me terrifient. Les hétéro je peux à peine exister auprès d’elleux. Je suis trans et je n’ai aucune idée de comment relationnent les mecs entre eux, j’ai toujours l’impression d’être constamment perçu comme femme ou trans, ce qui me pousse à me outer moi même. Parfois je rêve d’être juste un mec simple sans avoir à rien dire. Mais ça me fais réfléchir, les milieux queer et féministes sont transphobes, par conséquent les mecs trans au final sont poussé à traîner avec les pédé ou les hétéro, et donc potentiellement rejoindre des groupes de mecs hétéro machistes dont on ne peut vraiment se séparer car sinon on est très isolé et que la solitude quand on est trans tue. Enfin je sais pas je me demande où je me sentirais le plus à ma place entre les lgbt, les lesbiennes, les pédé, les meufs hétéro et les mecs hétéro. Je pense un peu nulle part. C’est pas le fait d’être isolé qui me dérange, c’est le fait d’avoir l’impression d’être condamné à la solitude. Mais bon, c’est quelque chose que je sais depuis l’enfance. Donc j’y suis déjà préparé mentalement même si de temps à autre c’est un peu plus dur. Enfin bref ce que je voulais dire c’est qu’à force de rendre les milieux hostiles pour les mecs ça fait que les mecs se retrouve coincé avec des mecs hétéro machistes. Et quand on a que ça, on fait avec. En particulier si je suis trans et que j’ai aucune communauté derrière, en sachant c’est quoi les risques pour moi si on découvre que je suis trans, quel risques je suis prêts à prendre ? Enfin, je dis ça mais aller au groupe de parole entre homme m’a rappelé que quand j’étais une femme hystérique je n’avais pas peur de me battre, et je sais que cette force est toujours là en moi, et je me rappelle que peu importe le rapport de pouvoir j’ai su parler, je peux alors le faire même en étant trans ? Ce texte est assez décousu, j’avoue que je ne me sens pas très bien. En ce moment c’est le procès de D.Pelicot et les autres, je me demande comment devenir un homme avec ça qui se passe ? Ça m’a rappelé à quel point quand j’étais enfant j’ai compris que mon corps était violable, en toute impunité, et que ma réaction de survie face à ça c’est d’accepter le viol et d’essayer de m’en remettre, c’est m’y préparer mentalement pour subir et continuer la vie. C’est tout. Qu’est-ce que je peux faire d’autres quand une femme se fait violer dans le coma par 90 hommes, le tout filmé, et que les hommes sont victimisés et la femme culpabilisée ? Hier j’étais au groupe d’information sur la fibromyalgie à l’hopital, il n’y avait que des femmes et j’étais le seul de mon âge. Je vois toutes ces femmes plus âgées que moi et en souffrance, je me dis, que j’ai un mental incroyable pour en être arrivé là, là où des femmes adultes et âgées en 15 ans ne sont pas arrivées. Je survie là où d’autres meurent. Ce n’est pas pour dire que je suis meilleur ou quoi, je sais et à la fois je sais pas ce qu’elles ont vécus. Je connais la douleur, je connais le désespoir qui va avec, je connais la violence, la solitude, les larmes, la haine de son corps et de sa vie et du reste du monde. Enfin, ce que je veux dire c’est que vu que c’est moi je trouve ça normal mais en voyant les autres je trouve ça assez exceptionnel d’avoir survécu. J’avoue que avoir les cheveux longs ou même juste un petit peu plus longs me manque. Là j’ai les cheveux courts, très courts, on voit bien mon visage, et surtout la peau de mon visage qui est toute abimée et frippée. Je trouve que quand j’ai les cheveux courts on voit davantage sur mon visage la violence qui me traverse et qui m’a traversé. Là je porte ma robe spéciale quand j’ai trop mal aux seins, car j’ai trop mal aux seins, et elle me va pas du tout avec mes cheveux courts, je me sens très moche, mais je n’ai pas qu’à me regarder dans le miroir, c’est une robe que je ne porte pas à l’extérieur. Je me demande à quoi je ressemblerai après la THS, je n’en ai aucune idée en réalité, je peux imaginer un peu. Il y a un podcast que j’ai écouté même si je supporte les podcast, qui disait « pourquoi transitionner et pas rester une butch ? » c’est vrai. Pourquoi transitionner ? J’ai longtemps essayé de me forcer à être lesbienne mais en réalité j’étais lesbienne pour pas être une femme. Je me demande quand même à quoi ça sert de transitionner car je sais bien que ça ne résoudra aucun de mes problème et que ça ne fera qu’en apporter encore plus – c’est déjà le cas. Je me demande à quoi ça sert de transitionner si de toute façon je ne peux pas vivre ? Pourquoi me rajouter des problèmes, pourquoi fripper davantage la peau de mon front ? Une partie de moi a envie de me laisser pousser les cheveux et retenter d’être une femme. Une autre sait que je suis un homme. J’ai l’impression qu’une partie de moi a envie de prendre de la T juste pour m’enlaidir encore davantage, je veux être une femme moche et laide, je veux que mon corps soit si laid, qu’il montre toute la violence toute la survie tout mon parcours. Je n’ai jamais réussi à être belle et je ne pense pas non plus que je réussirai à être beau. La beauté ce n’est pas pour moi, l’amour non plus. Je vais bientôt prendre de la T donc, je me rends compte que j’ai oublié de demander des info sur l’atrophie vaginale et que je suis dans la merde si ça m’arrive. Dans quelle condition est-ce que je vais transitionner ? Dans la honte et la peur ? Dans la solitude et le placard ? Comme d’autres trans.
Les gens ils comprennent pas. Ils comprennent pas la dysphorie. Moi même je dois me regarder en face et me dire « oui, ça, c’est de la dysphorie, oui, la dysphorie est partout ».
La dysphorie est partout. As tu déjà discuter de genre avec ton ami-e ? Non ? C’est normal, parler de genre c’est parler de blessures et d’insécurités. Moi j’ai tellement besoin de parler de genre partout mais je n’ose pas car c’est un sujet désagréable et minés, déjà que ma présence n’est pas la bienvenue, je vais pas en plus ouvrir ces plaies. Quelles sont tes blessures du genre ? « si tu veux transitionner mais que tu as peur d’être moche c’est que tu es trans » moi j’ai peur d’être moche, j’ai peur de perdre mes cheveux, j’ai peur de perdre tout ce qu’il me reste sans avoir la capacité de rien trouver ou construire ailleurs, et j’ai peur d’en mourir. Voilà, ce qui bloque ma transition. Là aussi, si vous ne savez pas vous ne pouvez pas vous rendre compte, ce que c’est, que d’avoir des douleurs intenses tous vos jours, toutes vos heures, si jeune, avec à chaque fois l’impression que tu vas mourir et qu’on t’arrache ta vie. Non tu ne sais pas c’est quoi le prix pour moi. Tout m’est cher.
J’ai tellement peur, j’ai tellement peur que prendre de la T me tue au sens purement biologique. J’ai aussi peur de pas être assez fort pour survivre à la transphobie, mais ça on verra plus tard. Mais là on me dit d’attendre encore et je me regarde et je me dis : combien de mois encore à être la gentille petite fille ? La femme docile ? La folle hystérique ? Combien de temps avant de pouvoir vivre ? COMBIEN DE TEMPS AVANT DE POUVOIR VIVRE ?
Est-ce que je dois me tuer pour vivre ? Est-ce que je pourrais un jour avoir accès à vivre ?